Workaholisme : dangers et solutions à l’addiction au travail

Pour certains, se mettre au travail est difficile. Ils procrastinent. Pour d'autres, s'arrêter de travailler est tout aussi difficile. J'ai longtemps fait partie de cette seconde catégorie, qui peut facilement souffrir de workaholisme.

Si vous, ou un proche, pensez souffrir d'une addiction au travail, cet article vous permettra d'en savoir plus sur ce mal encore peu reconnu (mais parfois valorisé).

Vous découvrirez

  • Le test WART pour évaluer votre addiction...
  • 11 symptômes de l'addiction au travail
  • Et 5 solutions à tester pour réduire l'emprise de cette addiction.

Prêt.e?

C'est parti.

Définition du workaholisme (addiction au travail)

L'addiction au travail, ou workaholisme se caractérise par un effort de travail compulsif, supérieur à la moyenne... qui conduit à la dépendance.

Comme toute dépendance, un effet d'accoutumance pousse le travailleur à chercher des sommets toujours plus haut... quitte à sacrifier sa santé, ses relations et ses centres d'intérêts.

Chez beaucoup de workaholiques, une fuite initiale engendre progressivement l'addiction au travail.

Par exemple, j'ai des problèmes financiers, je travaille plus (plutôt que de dépenser moins ou résoudre mes problèmes financiers)... je suis récompensé par mes efforts... ce qui me pousse à travailler encore plus... Mes problèmes financiers n'ont pas disparu pour autant. Ils ont même grossi.

Désormais, les efforts pour résoudre les problèmes financiers sont beaucoup plus importants et je préfère rester dans le déni en travaillant.

Le succès apporte un déséquilibre dans la vie : celui d'avoir beaucoup à perdre. - Nassim Nicholas Taleb

Un autre exemple : une femme perd son mari, elle fuit à travers son travail, elle est récompensée par son entreprise, puis la peur de perdre son nouveau statut et ce qu'elle a construit, créer cette dépendance au travail.

L'addiction au travail : un mal peu reconnu

Le workaholisme est reconnu comme un trouble psychique.

Mais pas comme une addiction, selon l'Organisation mondiale de la Santé. Une absence de reconnaissance officielle n'est pas synonyme d'une absence du problème. Comme se fut le cas avec l'addiction aux jeux vidéo, plus de 15 ans ont été nécessaires pour que cette addiction soit officiellement reconnue.

De plus, l'addiction au travail est acceptée, voire valorisée dans notre société qui met la productivité sur un piédestal.

Le hic ?

Si la productivité est mesurable sur une chaîne de montage ou dans une usine, la productivité chez le travailleur du savoir est plus difficile à mesurer. Ainsi, les travailleurs sont incités à paraître productifs, plutôt qu'être productifs.

Ils passent de plus en plus de temps à parler du travail (réunion, mails, slacks, etc)... qu'à travailler.

Les outils numériques n'aident pas : ce qui devait offrir de la flexibilité se transforme en laisse technologique. Nous pouvons envoyer des e-mails à n'importe quelle heure, consultez notre messagerie instantanée.

Ce n'était pas le cas il y a quelques années. Pour la plupart des travailleurs, quitter l'entreprise signifiait quitter le travail.

Quels sont les risques de la dépendance au travail ? 

En fait, chaque système à des limites. Si un système dépasse et reste trop longtemps hors de ces limites, il risque sa propre destruction.

Exemple d'une Ferrari : si vous roulez à 250 km/h durant des heures, même le moteur de qualité risque de surchauffer et de tomber en panne.

De la même manière, notre corps humain a des limites.

Elles varient d'un individu à l'autre, mais la biologie nous impose des limites comme le fait de boire de l'eau chaque jour, manger, dormir un certain nombre d'heures.

Il est possible de vivre deux jours sans boire de l'eau, il est possible de "fonctionner" en dormant moins de 6h par nuit. Mais, la performance est en chute libre...

L'addict au travail joue (sans s'en apercevoir) avec ses limites. Le corps lui envoie des signes qu'il ignore durant des mois, voire des années. Voici quelques symptômes qui devrait attirer votre attention sur votre relation au travail.

Quels sont les symptômes de l’addiction au travail ? 

  • Vous prenez souvent du travail chez vous, à la maison. Ça interfère avec votre vie privée et ça vous fait culpabiliser.
  • Vous n'avez plus de vacances à prendre (ou vous n'avez pas pris de vacances depuis plus d'une année). Si vous prenez des vacances, vous travaillez pendant celles-ci.
  • Vous travaillez durant vos pauses (vous mangez devant vos écrans).
  • Vous avez des problèmes de santé liés au stress : maux de tête, insomnies, maux de vente, tensions musculaires.
  • Vous êtes fatigué et vous compensez avec le café.
  • Vos proches se plaignent de la quantité de travail que vous effectuez.
  • Le travail est un moyen de fuir vos problèmes.
  • Vous annulez des activités personnelles à cause du travail
  • Vous pensez constamment au travail
  • Vous remplacez souvent vos collègues absents.
  • Vous ne prenez pas de congés de maladie

L'addiction au travail qui tourne mal

Un système sain oscille autour d'un certain état : il s'agit de l'homéostasie. Le système se régule pour rester entre deux limites. Limite haute et limite basse.

Le problème n'est pas de faire une nuit blanche. Le problème est de constamment dormir moins de 6h.

Le problème n'est pas de manger un burger.
Le problème est de manger un burger au quotidien.

Les extrêmes puent. Faire trop de sport, c'est aussi mauvais que la sédentarité. Trop travailler est autant mauvais que de rester affalé sur son canapé (en termes de santé).

Lorsque les symptômes listés ci-dessus sont ignorés suffisamment longtemps... ça peut mal tourner. Voici la "suite logique" d'une addiction au travail.

Si vous ne prenez pas suffisamment de temps pour vous régénérer... la conséquence à moyen et long terme est un burn-out, dépression, maladie ou mort prématurée. Je n'exagère pas.

Voyez par vous-même : au Japon, le terme karoshi peut être traduit littéralement par "mort par surmenage", le plus souvent par crise cardiaque ou accident vasculaire cérébral.

Le premier cas de karoshi a été signalé en 1969. Le ministère japonais du Travail a commencé à publier des statistiques sur ce syndrome en 1987 et le Conseil national de défense des victimes du karoshi a été créé l'année suivante.

Quelque dix mille décès par an au Japon sont aujourd'hui attribués au karoshi, et les recherches montrent qu'il existe cinq facteurs clés :

  • Des heures extrêmement longues qui interfèrent avec les schémas normaux de récupération et de repos.
  • Le travail de nuit qui interfère avec les schémas normaux de récupération et de repos.
  • Le travail sans vacances ni pauses.
  • Le travail sous haute pression sans pauses.
  • Travail physique extrêmement exigeant et travail continuellement stressant

Le hic ?

Dans une société où le stress est porté comme un badge d'honneur, le besoin de régénération est perçu comme une faiblesse.

Mais ne vous trompez pas : les rituels spécifiques pour gérer notre énergie sont essentiels pour performer sur la durée. Et ces rituels nécessitent du temps.

Comment prévenir l’addiction au travail ?

1. Reconnaître son addiction

Si vous lisez cet article, c'est un bon début.

Mais savoir n'est pas ressentir. Il y a une différence entre savoir ce qu'il faut faire, en théorie, et agir. Comme toute addiction, c'est souvent la souffrance qui est le moteur caché du changement.

Je peux passer des années à me tuer au travail... mais un jour ma femme demande le divorce et déclic. Je change. (Dans ce cas, c'est souvent trop tard, mais c'est pour illustrer l'idée).

Nous avons tous une tolérance personnelle à la souffrance. Pour certains, quelques nuits d'insomnies suffisent à se remettre en question. Pour d'autres, deux crises cardiaques ne sont pas suffisantes.

Si vous reconnaissez certains symptômes mentionnés ci-dessus, il se peut qu'une dépendance au travail soit présente.

Le test WART, une autre manière de reconnaître l'addiction au travail

Le WART (Work Addiction Risk Test) de Bryan Robinson permet de caractériser l’engagement excessif au travail et le « workaholique ».

Vous le trouverez ici.

2. Mesurer l'addiction

Une manière intéressante de ressentir l'addiction est de mesurer celle-ci. Kelly McGonigal Ph.D en parle dans son livre The Willpower Instinct :

"Quand vous souhaitez changer un comportement, concentrez-vous à réduire la variation dans les quantités du comportement (plutôt que de réduire le comportement). Les fumeurs à qui on demandait de fumer le même nombre de cigarettes chaque jour (en notant le nombre de cigarettes qu'ils fumaient) ont graduellement réduit leur consommation (bien qu'on leur ait demandé de ne pas réduire)."

Comment mesurer l'addiction au travail ?

Un bon indicateur est le temps passé au travail. Il existe plusieurs logiciels. Il y a quelques années, je recommandais le logiciel Rescue Time... mais depuis peu, je préfère Memtime.

L'intérêt de Memtime est qu'il inscrit automatiquement le temps passé sur les sites et logiciels que vous visiter. Vous pouvez ensuite attribuer ce temps manuellement à certains projets.

Je le recommande à mes coachés.

Une autre astuce est d'ajouter un "widget" temps d'écran sur l'écran d'accueil de votre smartphone. Ça vous permet de prendre conscience du temps passé sur celui-ci.

Un grand temps d'écran sur votre smartphone n'est pas synonyme d'addiction au travail, c'est évident. Mais l'utilisation de Memtime et la mesure de votre temps d'écran vous fera réaliser bien des choses.

3. Se documenter sur l'importance du repos délibéré

Quand j'ai arrêté de boire de l'alcool, la première étape était de reconnaître que si je continuais de consommer cette drogue, ma vie n'allait pas s'améliorer.

J'ai pris les devants parce que ma dissonance cognitive devenait de plus en plus difficile à tenir.

D'un côté, je faisais du sport, je mangeais sainement, je prenais soin de mon sommeil... et plusieurs fois par mois, je vivais des soirées (berlinoises, je précise) qui me faisaient rentrer à 10h ou 12h du matin.

Un jour, j'ai commencé à lire des ouvrages sur cette substance, sur les victimes de l'alcool, et forcément, avec les mois qui passaient, je me constituais une liste d'arguments qu'il était de plus en plus difficile à renier.

Si je vous parle de cette histoire, c'est que le processus est similaire pour d'autres addictions (comme la cigarette que j'ai aussi arrêtée).

Et en lien avec l'addiction du travail, je vous recommande de lire des ouvrages qui mettent le repos délibéré sur un piédestal.

Voici quelques ouvrages (anglais) avec mes notes de lecture (en français)

4. Trouver une activité passionnante

Restons sur l'alcool. Si je veux arrêter de boire de l'alcool, je dois le faire pour pouvoir poursuivre une aventure encore plus excitante que ce que l'alcool me procure.

Pour ma part, c'était l'aventure Organisologie, mais aussi la kettlebell et simplement, l'idée de libérer mon potentiel.

Dans une expérience, Cal Newport, l'auteur du livre Deep Work souligne l'importance d'avoir une activité de remplacement (cette fois, lorsqu'on souhaite quitter les réseaux sociaux) :

Cal a recruté 1600 personnes pour tenter de vivre 30 jours sans réseaux sociaux. Ceux qui ont réussi n'ont pas uniquement résisté, ils ont structuré leur journée en plaçant une alternative positive aux réseaux sociaux. Sortir, faire du sport, retrouver la bibliothèque.

Il en va de même pour le travail : si vous êtes accro au travail, qu'est-ce qui peut être plus intéressant que des heures sup ? Des week-ends à consulter des e-mails ? Des vacances à passer des coups de fils ?

Je ne peux pas répondre à votre place, mais sans une activité plus intéressante, vous reviendrez automatiquement au travail car :

  • Les outils numériques ont très peu de friction pour être utilisés.
  • Ils permettent de rester connecté au travail.

5. Trouver un partenaire pour ce nouveau défi

Dernière étape : le partenaire.

Dans l'académie de l'Organisologie, il y a un exercice que je recommande dans toutes mes formations. Il s'agit de trouver un binôme de formation pour avancer ensemble et terminer la formation.

Pourquoi ?

Lorsque les performances sont mesurées, elles s'améliorent. Lorsque les performances sont mesurées et font l'objet d'un rapport, le taux d'amélioration s'accélère. 

Cette citation, connue sous le nom de loi de Pearson, est attribuée à Karl Pearson, un statisticien qui a étudié avec Albert Einstein et qui était mondialement connu pour sa perspicacité.

De plus, une étude américaine menée par The American Society of Training and Development (ASTD) a montré que vous avez 65 % de chances d'atteindre un objectif si vous dites à une personne d'autre que vous vous engagez à le réaliser.

Et si vous faites des vérifications spécifiques avec un partenaire, vos chances de réussite augmentent de 95 %

Ma recommandation : essayez de trouver un partenaire qui a le même niveau de motivation et d'énergie que vous.

Quelqu'un de dynamique et de fonceur ne fonctionnera pas très bien avec quelqu'un qui a toujours besoin d'être poussé pour se mettre en route. La personne la plus dynamique trouvera cela épuisant.

Un exercice simple à faire : envoyer une photo à votre binôme lorsque vous cessez de travailler. 

Et une fois par semaine, vous vous retrouvez pour faire votre "rapport".

  • Qu'est-ce qui s'est bien passé ?
  • Qu'est-ce qu'il faut améliorer ?
  • Que ferez-vous le week-end prochain plutôt que de travailler ?
  • Quels changements dans votre contexte allez-vous mettre en œuvre pour ne plus pouvoir accéder à vos e-mails hors du travail ?

Votre partenaire vous aidera à passer la période de sevrage avec plus de facilité. Car oui, les premiers temps ne seront pas agréables. Comme toute addiction, arrêter celle-ci ne se fait pas en un claquement de doigts.

Prenez Dick Wolf, le producteur exécutif de Law & Order et d'une demi-douzaine d'autres séries télévisées. Il a confié un jour à un journaliste qu'il avait travaillé jusqu'à trente-quatre jours d'affilée, et qu'il était resté jusqu'à quatre ans sans prendre de vacances. "Ce qui est effrayant", a-t-il expliqué, "c'est que j'ai perdu la capacité de m'éteindre, même le week-end, même lorsque je suis dans le Maine, où nous avons une maison de vacances loin de tout, et même si je n'ai rien à faire lorsque je suis là-bas."

Conclusion : workaholisme un mal peu connu et valorisé

L'addiction au travail est un mal peu connu et valorisé dans un monde capitaliste.

Comme toute addiction, celle-ci peut dégénérer et causer des problèmes importants pour la personne dépendante... et son entourage.

Plusieurs raisons font que l'on peut s'enfoncer dans le travail...

  • des problèmes personnels que l'on préfère ignorer
  • une culture d'entreprise qui favorise un dévouement total au travail...

Pourtant, il est démontré depuis des années que les travailleurs les plus performants sont aussi ceux qui se régénèrent activement. Ils savent qu'une heure de sommeil en moins n'est pas synonyme d'une heure de productivité en plus.

Et parce qu'ils connaissent leurs limites, lorsqu'ils travaillent, ils travaillent. Lorsqu'ils ne sont plus au travail, ils ne travaillent plus.

Julien

PS : Et évidemment, si après avoir suivi ces recommandations, votre situation ne s'améliore pas, je vous recommande de consulter un spécialiste. Le site ReConnecte peut vous aider.

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