Je procrastine (Intelligemment): 4 Stratégies pour Agir selon Vos Intérêts

Si vous m’avez trouvé via Google, il y a de fortes chances que vous lisiez cet article plutôt que de faire autre chose.

Une étude (vieille de 10 ans) démontre que 47% du temps passé en ligne est de la procrastination.

Ou alors, la procrastination vous fait vraiment souffrir.

Bon, avant que vous quittiez la lecture de cet article pour d’autres contrées, je vais faire en sorte de rendre utiles les prochaines minutes que vous passez en ma présence.

Car dans l’article qui suit, vous découvrirez comment lutter contre la procrastination… intelligemment. Ainsi, vous pourrez à tout moment vous dire « je procrastine intelligemment ». Et comme vous le verrez plus loin… c’est bon pour votre dissonance cognitive 😉

Pourquoi intelligemment? Parce que pour avoir lu pas mal de livres sur le sujet, je réalise à quel point les exercices proposés aux procrastinateurs sont des exercices qui ne sont jamais réalisés (vu qu’ils procrastinent). C’est une sorte de meta-procrastination. J’invente des mots… je sais.

Néanmoins je tiens à vous prévenir: si vous n’avez pas profondément envie de changer alors tous les conseils du monde ne vous seront d’aucunes utilité. Et vu que la documentation sur la procrastination est très importante sur le net… vous pourrez continuer à vous donner bonne conscience des années en cherchant le conseil magique sur internet.

Pourquoi suis-je si direct? Parce que la procrastination est une habitude. Et ce n’est que le début de votre découverte: 

La procrastination est un comportement qui s’installe en nous pour une multitude de raisons. 

Parfois, il s’agit d’une protection de l’estime personnelle (j’en parle plus loin), parfois une manière de se sentir bien en « échangeant une délivrance temporaire pour des problèmes longs-termes »

Mais peu importe la cause de votre procrastination. Pour ma part, quand je procrastine c’est par habitude. Et comme toute habitude, modifier celle-ci est un processus qui ressemble à une danse (plus d’info plus loin). Comme toute habitude, il est important de comprendre les éléments qui la composent afin de pouvoir la changer.

Mais la plupart des procrastinateurs n’agissent pas ainsi… ils vont plutôt (face à la procrastination) se dire: 

  • Demain, j’aurai plus d’énergie, je me sentirai mieux, je me sentirai prêt
  • J’ai encore suffisamment de temps
  • Je travaille mieux sous stress

Je reviendrai sur cette croyance fréquente qu’est le travail bien accompli sous stress…  avant cela, qu’est-ce qui nous pousse à procrastiner?

Je procrastine probablement (en partie) à cause de ces 3 biais cognitifs:

procrastination et dissonance cognitive

1. Les récompenses immédiates ont plus de poids que les récompenses long terme

Les récompenses futures semblent peu importantes. Un peu comme si on regardait de loin une montagne à gravir en se disant « facile, elle est petite ». Nous sommes mauvais à évaluer les ressources nécessaires pour réaliser quelque chose lorsque le temps est impliqué. Ce concept est également connu sous le terme: temporal discounting.

Ainsi les récompenses futures semblent moins intéressantes que les récompenses immédiates. Sur le plan de l’évolution, cela fait sens. Nos cerveaux primitifs ne sont pas encore très bien adaptés aux dates butoirs, deadline et autres échéances longs terme.

Mais ce n’est pas tout:

2. Sous-estimer le temps que nécessite une tâche et surestimer mes capacités à la réaliser

Je procrastine et j'estime mal mon temps

Nous sommes mauvais à planifier le temps nécessaire à une tâche. C’est dû à deux concepts intitulés «the planning fallacy» par Daniel Kahneman et le biais de l’optimisme qui nous pousse à imaginer que tout ira bien.

En parlant d’optimisme, le cas est flagrant chez le fumeur qui vous parle de son oncle qui a fumé deux paquets de cigarettes par jour jusqu’à 99 ans… (et qui ne parle pas des types qui meurent à 55 ans d’un cancer). 

Et le meilleur pour la fin: 

3. Je procrastine, mais tout va bien: ou comment je crée mon propre bonheur…

Une dissonance cognitive est la tension qui se crée lorsque mes intentions et mes actions diffèrent. Par exemple si je souhaite être fidèle, mais que je trompe ma femme, alors de la tension va se créer en moi. Cette tension peut prendre la forme de culpabilité, de colère, d’anxiété, de malaise, etc.

Et l’humain va trouver des techniques pour réduire cette tension. Vous l’avez deviné, la procrastination crée de la tension, car on souhaite faire A, mais on fait B. On souhaite faire du sport et on finit affalé devant une série. 

Voici quelques réactions typiques pour tout de même aller bien… malgré le fait de procrastiner.

6 techniques pour réduire la dissonance cognitive

C’est important de les connaître simplement pour pouvoir mieux les repérer et mieux les gérer dans les jours qui suivent…

1. Distraction: on détourne notre attention de la tension.

On peut s’aider par exemple en prenant des psychostimulants, de l’alcool, des jeux vidéos ou simplement en allant se changer les idées entre amis.

2. Banalisation

Cela implique de travailler sur ces croyances, par exemple en réduisant / ou augmenter l’importance d’une croyance / comportement.

Un exemple fréquent: je travaille mieux sous stress (croyance).

Arrêtons-nous une seconde sur le fait de mieux travailler sous stress. Il s’agit souvent d’une stratégie d’autohandicap afin de protéger son estime personnelle.

Bon vous vous dites peut-être… « NAH FOUTAISE JULIEN! » Mais attendez de lire ce qui suit:

Des chercheurs ont réuni des procrastinateurs et des non-procrastinateurs. Ils ont ensuite créé deux groupes. Chaque groupe était composé de procrastinateurs et de non-procrastinateurs.

  • Le groupe 1 devait réaliser une tâche mathématique pour évaluer leurs performances.
  • Le groupe 2 devait réaliser la même tâche mathématique, mais celle-ci était présentée comme un jeu (pas d’évaluation des performances).

Les participants des deux groupes avaient 15 minutes à disposition avant de réaliser la tâche mathématique: ils pouvaient soit en s’entraîner à la tâche à venir, soit jouer à un jeu vidéo.

Les résultats sont intéressants:

  • Les procrastinateurs du groupe 1 ont essentiellement joué durant les 15 minutes (stratégie d’autohandicap), car ceux-ci se savaient évalués.

  • Les procrastinateurs du groupe 2 ont utilisé les 15 minutes pour s’entraîner à la tâche… car ceux-ci savaient ne pas être évalués. Donc pas de risque pour l’estime personnelle (ou la réputation) en cas d’échec. Les non-procrastinateurs se sont entraînés à la tâche.

D'ailleurs cela me fait penser à une amie qui travaille mieux sous stress mais qui adore organiser à l'avance une multitude d'activités dans son cercle social...

Cette expérience démontre que la plupart des procrastinateurs vont retarder l’action afin de réduire les chances de réussite et ainsi avoir une excuse. Tout ceci afin de se protéger d’un éventuel échec.

Dans la vie, cette expérience prend la forme suivante: on repousse jusqu’au dernier moment (la nuit avant un examen, la nuit avant une deadline) et ainsi, en cas d’échec, on a une excuse plus ou moins plausible: on n’avait peu de ressources à disposition. Si on réussit, c’est exceptionnel et la fierté éprouvée est encore plus grande!

3. Rejeter la responsabilité

Ce n’est pas de ma faute si j’ai trompé ma femme. J’étais bourré, la femme avec qui j’ai couché m’a vraiment allumé. Etc.

4. Chercher des informations confortantes 

Je vais sur des forums et je réalise que tromper sa femme est une manière de se rendre compte à quel point elle est bien et ainsi de renforcer le mariage (si si les humains peuvent se raconter ce genre de truc…)

5. Cela aurait pu être pire 

Bon j’aurai pu tromper ma femme sans me protéger…

Cela nous aide à mieux nous sentir. Nous arrivons maintenant sur le dernier point permettant de réduire la dissonance cognitive:

6. Changer ses comportements

Si je cherche à pratiquer la vérité, car c’est important pour moi d’être honnête, alors je vais me corriger pendant une discussion lorsque je m’attrape en train de mentir. Même lors de petits mensonges.

C’est évidemment cette dernière option qui est la plus intéressante, mais qui nécessite le plus d’efforts…  vous avez maintenant le savoir pour passer à l’action et commencer à réduire votre procrastination. Mais soyez bienveillant envers vous même et souvenez-vous de ceci: 

Lutter contre la procrastination, c’est comme un cha-cha-cha: deux pas en avant, un pas en arrière. Prévoyez des changements rapides, mais des rechutes fréquentes.

Souvenez-vous de ceci: ce n’est pas parce que je ne m’entraîne pas un jour que je vais cesser de m’entraîner. Ce n’est pas parce que je ne dors pas une nuit que je vais cesser de dormir. Ce n’est pas parce que je procrastine sur une tâche que je vais arrêter de procrastiner.

Il est intéressant de percevoir les retours en arrière comme une opportunité permettant de se rendre compte des bienfaits d’une pratique. Il y a quelques semaines (le 31 août plus particulièrement) je me suis fait un immense menu Mac Do.

Cela faisait des semaines que mon alimentation était composée de lentilles et de légumes vapeurs. Mais avec le temps, on oublie les bienfaits d’une pratique et c’est en retombant dans des excès opposés que ceux-ci (les bienfaits) reviennent visibles.

Si durant quelque temps vous ne procrastinez plus, vous pouvez oublier quel bien cela fait de ne plus culpabiliser… ainsi si vous vous surprenez à repousser au lendemain et à renouer avec cette sensation de culpabilité, voyez ceci comme une opportunité. L’opportunité de recommencer.

À présent, les exercices pour cesser de tout remettre au lendemain

1. Je procrastine consciemment

Je procrastine consciemment

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La prise de conscience permet de repérer plus facilement les moments où vous commencez à procrastiner.

Dans la semaine qui suit, je vous invite à simplement prendre note (mentalement, sur papier ou sur votre ordinateur) des tâches sur lesquelles vous procrastinez ainsi que les émotions / sensations qui accompagnent ces moments de procrastination.

Comment? Différents types de procrastination?

À oui, j’allais oublier: 

On procrastine tous. Je procrastine. Vous procrastinez. Mais la procrastination qui nuit à nos vies est la suivante: Le report volontaire d’une action prévue malgré le fait que cela puisse nuire à l’individu, l’exécution de la tâche ou le sentiment de l’individu.

Maria qui entend son fils vomir dans sa chambre va délibérément repousser la lessive qu’elle devrait faire pour s’occuper de son fils. En terme de comportement, il s’agit de procrastination, mais dans ce cas précis, elle s’adapte à son environnement pour continuellement réaliser sa mission: être la meilleure des mères. Le comportement est le même, mais les causes sont différentes.

En prenant conscience des excuses fréquentes et des sensations éprouvées lors des procrastinations nuisibles, vous pourrez plus facilement mettre en place ce qui suit:

2. Identifier le coût de procrastiner

Quand on y pense, la procrastination ne concerne pas uniquement le travail et les tâches à réaliser.

  • Qu’en est-il de repousser une alimentation plus saine?
  • Qu’en est-il de remettre à demain une session de kettlebell (sport)?
  • Qu’en est-il de procrastiner sur une discussion importante ou l’acquisition de nouvelles compétences?

L’exercice intéressant à réaliser chaque fois que vous procrastiner et de faire l’exercice (mental, sur papier ou sur un ordinateur) suivant: 

Je procrastine sur ma séance de sport… les coûts de la procrastination sont les suivants:



  •  

Les bénéfices d’agir en temps opportun sont les suivants:




3. Votre intention doit outrepasser votre état actuel

Quand je procrastine, je pense que demain je me sentirai mieux pour agir. Ce qui est important de comprendre, c’est que ce n’est pas vrai (note, depuis que je suis suspicieux face à mes pensées, je vais beaucoup mieux.. même si l’écrire fait un peu schizo).  

Cette recherche démontre que l’on est de mauvais prévisionnistes. Tant les météorologues semblent pouvoir prédire la météo avec plus ou moins de précision, nous sommes mauvais à prédire nos futurs états émotionnels (affective forecasting).

L’idée principale est que nous avons un biais cognitif lorsqu’il s’agit de prédire l’impact des événements positifs et négatifs dans un futur proche. Dans une étude des gagnants de loterie ont démontré un niveau de bonheur égal à celui qu’ils avaient avant de gagner. Ce concept est identique pour des personnes ayant perdu l’usage de leurs membres. Quelques années plus tard, ceux-ci démontraient un niveau de bonheur égal à celui qu’ils avaient avant de perdre l’usage de leurs membres.

Comment expliquer cela?

2 concepts: Le focalisme et le présentisme.

Le focalisme est la tendance à sous-estimer l’ampleur de l’influence des événements futurs sur nos pensées et sensations. Le présentisme (et non le présentéisme) est la tendance à trop accentuer l’importance du présent sur le futur.

Mis ensemble, cela signifie notre état émotionnel actuel influencera notre perception de notre état émotionnel futur. 

Êtes-vous déjà allé acheter de la nourriture en ayant faim? En général on achète trop. Souvent, on pense que notre état actuel sera notre état futur.

Le vrai piège arrive ici lorsque je procrastine: 

Quand on repousse à demain, on se sent bien. Ou du moins, on ressent un soulagement, car on n’a pas besoin de travailler sur la tâche (souvenez-vous, on privilégie les récompenses immédiates aux récompenses futures). Et on se rassure en réduisant la dissonance cognitive « je travaille mieux sous stress ». De plus, on s’imagine engagé dans une action qui nous rendra heureux.

Si je repousse mon sport à demain, car je suis fatigué et qu’il ne faudrait pas que je me blesse, je me dis que je me prends tout de même en main. Ceci me fait me sentir bien dans le présent et je prédis ressentir le même état émotionnel demain avant de commencer mon sport. 

Alors qu’on se berce d’illusions…
Que faire alors?

S'attendre à être faux et faire avec.

Premièrement, plutôt que de vouloir changer notre nature humaine et cherchant à mieux prédire nos états futurs, une approche plus directe est de partir du principe que l’on est de mauvais pronostiqueurs et que demain, les chances sont élevées de ne pas sentir enthousiaste à l’idée de commencer une tâche.

Concrètement, lorsqu’on se surprend à se dire « demain je me sentirai mieux pour agir », il est important de se dire « non, en fait c’est un problème avec mes prévisions. Les chances sont élevées que je ne me sentirai pas mieux ». En ajoutant l’élément suivant:

Mon état motivationnel actuel n’a pas besoin de répondre à mon intention d’agir. 

Je vous invite même de l’écrire quelque part. 

Il y a beaucoup de tâches que je n’apprécierai jamais faire et c’est comme ça. C’est OK ainsi. Il est possible de faire des choses que l’on n’aime pas faire, car on sait que cela nous permettra de réaliser des objectifs qui comptent pour nous. 

Un coureur préfère probablement courir lorsqu’il ne pleut pas. Mais va-t-il pour autant repousser son entraînement lorsqu’il pleut? NON. 

Tout comme je préfère aller au travail quand il ne pleut pas, je ne vais pas rester dans mon lit en position du foetus lorsque j'entends qu'il pleut dehors. Je vais tout de même AGIR en prenant par exemple un parapluie.

Deuxièmement, partir du principe que demain, on ne se sentira pas bien (dans le cas où l’on repousse tout de même), mais se souvenir que c’est un état transitoire et qu’une fois dans l’action, celui-ci change. Souvent on réalise que la tâche n’est pas si pénible et que l’on se sent mieux, car on a commencé…

Et vous voilà à présent bien armé. Mais il vous manque un élément important:

4. L’implémentation d’intention

Plusieurs études ont démontré l’efficacité de l’implémentation d’intention lorsqu’il s’agit de maintenir un engagement dans la poursuite d’un comportement / d’un objectif.

Mais à quoi ressemble une implémentation d’intention?


  • Quand la situation X est rencontrée ALORS le comportement Y est déclenché.

  • Quand je me surprends à me dire que demain je me sentirai mieux ALORS je me rappelle que mon état motivationnel actuel n’a pas besoin de répondre à mon intention d’agir.
  • Quand je vais uriner ALORS je fais 10 pompes

  • Quand une personne s’énerve ALORS je lui demande se dont elle a besoin pour aller mieux

Quand je termine mon déjeuner ALORS je vais m’asseoir à mon bureau et j’écris le plan de l’article sur la procrastination.

Vous voyez l’idée?

À présent, vous êtes armé jusqu’aux dents. Il vous suffit de reprendre la première liste (les tâches sur lesquelles vous procrastinez). Vous pouvez détailler ces tâches en indiquant également les choses que vous ne ferez pas. Par exemple:

Je procrastine sur la rédaction de mon travail de master et je me sens comme une petite merde incapable.

Liste du 12 octobre 2018

  1. Se réveiller à 7h
  2. Ne pas snoozer
  3. Ne pas consulter internet / les réseaux sociaux
  4. Me lever et me faire un café
  5. QUAND j’aurai terminé mon premier (ou deuxième) café ALORS j’irai m’asseoir au bureau et je développerai le plan du chapitre 3 intitulé XYZ de ma thèse.

Soyez spécifique, rédigez cette liste le soir avant d’aller au lit et souvenez-vous… cha-cha-cha.

Merci pour votre attention! 

Julien! 

PS: Découvrez 5 témoignages de personnes qui ont vaincu la procrastination.

PPS: Redéfinissez le problème de la procrastination pour mieux le traiter.

Sources:

  • Solving the procrastination puzzle
  • La procrastination - l’art de reporter au lendemain - John Perry
  • Comment ne pas tout remettre au lendemain - Bruno Koeltz
  • Études et recherches - en lien dans le texte
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